4e, 16 points, 7 journées. Les chiffres traduisent de manière implacable l'excellent début de saison des lorientais. Pourtant, les trois milieux ainsi que les trois attaquants titulaires des Merlus étaient déjà au club la saison dernière. On a l'impression que Régis Le Bris a métamorphosé cette équipe en l'espace de quelques semaines, faisant de joueurs moyens des éléments d'exception. Il est alors légitime de se demander si ces performances intéressantes sont les fruits d'une réelle transformation des joueurs, ou plutôt d'une surperformance.
Pour essayer de répondre à cette question pour le moins difficile, j'ai décidé de comparer le match de Lorient contre Nantes d'il y a un an à celui de cette année. Il s'agit du match perdu 0-1, où Moses Simon avait fait une main spectaculaire dans la surface, pour vous replonger dans le contexte. J'ai volontairement choisi Nantes car il s'agit d'une équipe pouvant être considérée comme un baromètre à l'échelle de la Ligue 1, elle n'est ni trop faible et ni trop forte pour Lorient. Nantes aborde la rencontre avec son habituel 3-5-2, et seuls Kolo Muani et Coulibaly de la version 2021 cèdent leur places à Ganago et Guessand en 2022. Nous allons nous intéresser à 3 joueurs qui ont vraiment franchi un palier sur ce début de saison. Enzo Le Fée était déjà l'homme fort de cette équipe, au moins sur le plan statistique. Avec 61 passes dont 16 dans le dernier tier du terrain, il est à l'origine de nombreuses situations offensives. Sur le plan défensif, c'est trop léger : seulement 8 duels gagnés contre 5 perdus, et aucune interception. Sous Le Bris, Enzo Le Fée possède davantage de liberté. C'est 47 passes pour 13 dans le dernier tier. Ces chiffres sont en accord avec les propos de l'entraîneur, qui souhaite une possession incisive et dangereuse. Sur ce point, l'évolution ne semble tout de même pas flagrante. Au niveau des duels, on retrouve des statistiques similaires : 10 gagnés contre 8 perdus, et toujours pas d'interception. Pas d'évolution sur le plan défensif. Pourtant, il semble clair qu'Enzo a fluidifié son jeu. On peut donc penser que cette évolution ne se traduit pas sur le plan individuel mais bien sur le plan collectif. Il ne serait donc pas question d'une éventuelle surperformance pour Enzo Le Fée, qui semble encore être capable d'aller plus haut. Intéressons-nous désormais à Terem Moffi, qui semble bien plus à l'aise dos au jeu et habile balle au pied. En 2021, on sent un attaquant en manque de confiance, et cela se répercute immédiatement sur les datas. Seulement deux tirs dont un cadré, 12 passes, et 3 duels gagnés. En 2022, il ne tire qu'une fois, ne fait que 8 passes, et remporte 4 duels. On observe là encore des données assez similaires, ce qui peut laisser penser que Moffi n'est pas en surrégime. Je dirais même qu'il peut aller au-delà. Enfin, l'une des évolutions les plus spectaculaires est certainement celle de Vincent Le Goff. Dépassé l'an dernier, l'infatigable latéral gauche semble avoir retrouvé ses jambes d'il y a quelques saisons. Serein défensivement, il se projette également davantage, et apporte un réel plus à cette équipe lorientaise. En 2021, c'est 14 ballons perdus, 39 passes, une interception. Sous Le Bris, 10 ballons perdus, 32 passes, et également une interception. Il a également gagné deux fois plus de duels (8 en 2022 contre 4 en 2021). Il y a un vrai progrès sur ces deux rencontres de la part de Vincent Le Goff. A 32 ans, on peut penser que Le Goff serait en train d'aller au-delà de son meilleur niveau, mais pas encore au point de parler de surperformance.
Cette analyse nous laisse penser que ces joueurs ne sont pas en train de dépasser leurs limites. Sur le plan individuel, la progression entre ces deux années, du moins de manière statistique, n'est pas aussi évidente qu'elle pourrait le paraître. On peut donc penser que d'autres paramètres entrent en compte, comme l'aspect mental. Pour conclure, je dirai que Régis Le Bris a transformé un groupe plutôt que onze éléments séparés. C'est peut-être cette transformation du collectif qui fait que le joueur n'est pas en surperformance. J'en conclus que Lorient peut perdurer à ce niveau, et semble même capable d'aller chercher encore plus haut.